Les litiges concernant les pergolas représentent une part significative des contentieux entre voisins en matière d’urbanisme. Ces installations, à mi-chemin entre aménagement paysager et construction, suscitent régulièrement des tensions de voisinage pouvant aboutir à des recours en démolition. Ce guide juridique analyse les fondements légaux permettant à un voisin d’exiger la démolition d’une pergola, les stratégies de défense pour le propriétaire concerné, et les solutions préventives pour éviter ces situations conflictuelles. À travers l’examen de la jurisprudence récente et des dispositions réglementaires applicables, nous proposons un éclairage complet sur cette problématique fréquente en droit de l’urbanisme et des relations de voisinage.
Qualification juridique de la pergola : entre construction et aménagement
La première étape pour comprendre les enjeux d’un recours en démolition consiste à déterminer précisément le statut juridique d’une pergola. Cette qualification n’est pas anodine puisqu’elle conditionne le régime d’autorisation applicable et, par conséquent, les fondements possibles d’un recours.
En droit français, une pergola peut être considérée soit comme une construction soumise à autorisation d’urbanisme, soit comme un simple aménagement bénéficiant d’un régime plus souple. Cette distinction s’appuie sur plusieurs critères déterminants que les tribunaux examinent systématiquement.
Le Code de l’urbanisme ne définit pas explicitement la pergola, ce qui laisse place à l’interprétation jurisprudentielle. Selon la jurisprudence constante, trois éléments principaux permettent de qualifier une structure de construction au sens de l’article L.421-1 du Code de l’urbanisme : l’ancrage au sol, la taille de l’ouvrage et sa pérennité.
Une pergola fixée au sol par des fondations profondes ou des scellements, présentant une surface significative (généralement supérieure à 5m²) et conçue pour durer dans le temps sera typiquement qualifiée de construction. À l’inverse, une pergola légère, facilement démontable et de petite taille pourra être considérée comme un simple aménagement.
Les critères déterminants selon la jurisprudence
La Cour de cassation et le Conseil d’État ont progressivement affiné les critères permettant de qualifier juridiquement une pergola. Dans un arrêt du 27 février 2018 (n°16-24.531), la Cour de cassation a considéré qu’une pergola en bois de 20m² scellée au sol constituait une construction nécessitant une autorisation d’urbanisme préalable.
D’autres caractéristiques techniques influencent cette qualification :
- La présence d’une toiture fixe ou amovible
- L’intégration d’équipements électriques ou d’éclairage
- Le caractère clos ou ouvert de la structure
- Les matériaux utilisés (bois, aluminium, PVC)
Une pergola bioclimatique à lames orientables, équipée d’un système électrique et ancrée solidement au sol sera systématiquement qualifiée de construction par les tribunaux, comme l’a confirmé la Cour administrative d’appel de Bordeaux dans un arrêt du 12 mars 2020.
Cette qualification détermine directement le régime d’autorisation applicable. Selon l’article R.421-9 du Code de l’urbanisme, les constructions créant une emprise au sol ou une surface de plancher comprise entre 5m² et 20m² sont soumises à déclaration préalable. Au-delà de 20m², un permis de construire devient nécessaire. Ces seuils peuvent être portés à 40m² dans certaines zones urbaines couvertes par un PLU, sous conditions spécifiques.
La qualification juridique constitue donc le point de départ fondamental de toute analyse relative à un potentiel recours en démolition. Un voisin mécontent devra d’abord établir la nature exacte de l’installation avant de pouvoir valablement contester sa conformité réglementaire.
Fondements juridiques du recours en démolition d’une pergola
Un voisin souhaitant obtenir la démolition d’une pergola dispose de plusieurs fondements juridiques susceptibles d’appuyer sa démarche. Ces moyens varient selon la nature de l’irrégularité alléguée et relèvent de régimes juridiques distincts.
Le recours pour violation des règles d’urbanisme
Le fondement le plus fréquemment invoqué concerne la violation des règles d’urbanisme. Ce type de recours s’appuie sur l’article L.480-13 du Code de l’urbanisme qui prévoit la possibilité de demander la démolition d’une construction édifiée conformément à un permis de construire lorsque ce permis a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative.
Ce recours exige deux conditions cumulatives :
- L’annulation préalable de l’autorisation d’urbanisme par le juge administratif
- L’introduction de l’action civile en démolition dans un délai de deux ans suivant cette annulation
Pour une pergola construite sans autorisation alors qu’elle y était soumise, le voisin peut directement saisir le juge judiciaire d’une demande en démolition, sans passage préalable devant le juge administratif. Cette procédure s’appuie sur les dispositions de l’article L.480-14 du Code de l’urbanisme.
Les motifs d’illégalité invocables sont nombreux :
L’absence d’autorisation constitue le grief le plus simple à établir. Si la pergola qualifiée de construction a été édifiée sans déclaration préalable ou permis de construire alors qu’elle y était soumise, l’irrégularité est caractérisée. Dans un arrêt du 15 janvier 2019, la Cour de cassation a confirmé que l’absence d’autorisation pour une pergola de 25m² justifiait sa démolition.
La non-conformité aux règles d’urbanisme locales représente un autre motif fréquent. Les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) contiennent souvent des dispositions spécifiques concernant :
- L’implantation des constructions par rapport aux limites séparatives
- La hauteur maximale des constructions
- L’aspect extérieur et l’intégration paysagère
Une pergola implantée à moins de trois mètres de la limite séparative dans une zone où le PLU impose ce recul minimal sera susceptible de démolition, comme l’a jugé la Cour d’appel de Montpellier dans un arrêt du 7 mai 2021.
Le recours fondé sur le trouble anormal de voisinage
Même en l’absence d’irrégularité au regard des règles d’urbanisme, un voisin peut fonder son action sur la théorie jurisprudentielle des troubles anormaux de voisinage. Ce fondement, indépendant du droit de l’urbanisme, repose sur le principe selon lequel « nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage ».
Pour être retenu, le trouble doit présenter un caractère anormal, c’est-à-dire dépasser ce qu’un voisin est raisonnablement tenu de supporter. Cette anormalité s’apprécie in concreto, en tenant compte du contexte local, de la configuration des lieux et de l’antériorité de l’occupation.
Concernant les pergolas, les tribunaux ont reconnu comme troubles anormaux :
Les atteintes à l’intimité et à la vie privée lorsque la pergola permet des vues directes sur le terrain voisin, en violation des distances légales prévues par les articles 678 et 679 du Code civil. La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 3 septembre 2020, a ordonné la modification d’une pergola créant des vues illicites sur la propriété adjacente.
Les nuisances visuelles caractérisées, notamment lorsque la pergola présente des dimensions imposantes ou des caractéristiques esthétiques particulièrement disharmonieuses avec l’environnement. Un arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 18 novembre 2019 a reconnu qu’une pergola de 4 mètres de hauteur, peinte dans une couleur vive, constituait une nuisance visuelle anormale justifiant sa modification.
Stratégies de défense pour le propriétaire de la pergola
Face à un recours en démolition, le propriétaire de la pergola dispose de plusieurs stratégies de défense pour protéger son installation. Ces moyens varient selon la nature du recours et les circonstances spécifiques de l’affaire.
Contestation de la qualification juridique
La première ligne de défense consiste souvent à contester la qualification même de la pergola comme construction soumise à autorisation d’urbanisme. Si le propriétaire parvient à démontrer que son installation constitue un simple aménagement non soumis à autorisation préalable, il peut faire échec au recours fondé sur l’absence de permis.
Pour étayer cette argumentation, plusieurs éléments peuvent être mis en avant :
- Le caractère léger et démontable de la structure
- L’absence d’ancrage profond au sol
- La surface limitée de l’installation
- L’absence de toiture permanente
La jurisprudence offre des précédents favorables aux propriétaires. Dans un arrêt du 5 mars 2018, le Conseil d’État a jugé qu’une pergola de 12m² reposant sur des plots non scellés et dépourvue de couverture fixe ne constituait pas une construction soumise à autorisation d’urbanisme.
Régularisation administrative
Lorsque la qualification de construction s’impose, le propriétaire peut entreprendre une démarche de régularisation administrative. Cette stratégie consiste à solliciter a posteriori l’autorisation d’urbanisme requise pour l’installation.
L’article L.421-9 du Code de l’urbanisme permet en effet la délivrance d’une autorisation de régularisation tant que l’administration n’a pas constaté l’infraction par procès-verbal. Même après constat, la régularisation reste possible si la construction est conforme aux règles d’urbanisme applicables.
La demande de régularisation suspend généralement l’examen du recours en démolition jusqu’à ce que l’administration se prononce. Si l’autorisation est accordée, elle fait obstacle à la démolition fondée sur l’absence d’autorisation préalable.
Dans un arrêt du 17 décembre 2020, la Cour administrative d’appel de Marseille a confirmé qu’un permis de construire obtenu en cours d’instance rendait sans objet le recours en démolition fondé sur l’absence d’autorisation initiale.
Prescription de l’action publique
Le propriétaire peut également invoquer la prescription de l’action publique en matière d’infractions urbanistiques. L’article L.480-4-1 du Code de l’urbanisme prévoit que l’action publique se prescrit par six ans révolus à compter de l’achèvement des travaux.
Cette prescription ne concerne toutefois que les poursuites pénales. Le recours civil en démolition reste possible dans certaines zones protégées, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 28 juin 2018.
En dehors des zones protégées, l’article L.480-13 du Code de l’urbanisme limite considérablement les possibilités de démolition depuis la loi Macron du 6 août 2015. Cette modification législative constitue un argument de défense précieux pour les propriétaires de pergolas situées en zone urbaine ordinaire.
Contestation du trouble anormal de voisinage
Face à un recours fondé sur la théorie des troubles anormaux de voisinage, le propriétaire peut contester la réalité ou l’anormalité du trouble allégué.
Cette contestation s’appuie généralement sur :
- Des expertises techniques démontrant l’absence d’impact significatif
- La conformité de l’installation aux usages locaux
- Le caractère ordinaire des inconvénients générés
L’antériorité de l’installation peut également constituer un moyen de défense efficace. La Cour de cassation reconnaît en effet la théorie de la « pré-occupation », selon laquelle celui qui s’installe en connaissance de cause à proximité d’une source de nuisances préexistante ne peut ensuite s’en plaindre.
Dans un arrêt du 8 juillet 2021, la Cour d’appel de Lyon a rejeté la demande de démolition d’une pergola en considérant que le voisin plaignant, ayant acquis sa propriété alors que la pergola était déjà édifiée, ne pouvait invoquer un trouble anormal de voisinage.
Procédures et voies de recours : aspects pratiques
Les litiges relatifs aux pergolas impliquent des procédures spécifiques qu’il convient de maîtriser, tant pour le voisin demandeur que pour le propriétaire défendeur. La compréhension des différentes juridictions compétentes et des étapes procédurales constitue un élément déterminant pour la réussite d’une action ou d’une défense.
Compétence juridictionnelle : la dualité des ordres
La première difficulté procédurale réside dans la détermination de la juridiction compétente, qui varie selon le fondement du recours.
Le juge administratif est exclusivement compétent pour connaître de la légalité des autorisations d’urbanisme. Ainsi, lorsque le recours en démolition s’appuie sur l’illégalité d’un permis de construire ou d’une déclaration préalable, le tribunal administratif doit être saisi en premier lieu pour obtenir l’annulation de l’acte administratif.
La procédure devant le juge administratif commence par un recours gracieux facultatif auprès de l’autorité ayant délivré l’autorisation, puis par une requête en annulation. Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter de l’affichage sur le terrain de l’autorisation d’urbanisme, comme le prévoit l’article R.600-2 du Code de l’urbanisme.
Le juge judiciaire (tribunal judiciaire) est quant à lui compétent pour :
- Ordonner la démolition après annulation de l’autorisation par le juge administratif
- Statuer directement sur les demandes fondées sur l’absence totale d’autorisation
- Connaître des actions fondées sur les troubles anormaux de voisinage
Cette dualité juridictionnelle complexifie les procédures et impose parfois une stratégie en deux temps : d’abord l’annulation administrative, puis l’action civile en démolition.
Procédure précontentieuse et médiation
Avant toute saisine juridictionnelle, une phase précontentieuse est vivement recommandée, voire obligatoire dans certains cas.
Depuis la loi du 18 novembre 2016, la tentative de médiation préalable est obligatoire pour les litiges de voisinage lorsque la demande n’excède pas 5 000 euros. Même au-delà de ce montant, le recours à la médiation présente de nombreux avantages :
- Réduction des coûts et des délais
- Préservation des relations de voisinage
- Recherche de solutions adaptées aux intérêts des parties
La médiation peut aboutir à des compromis pragmatiques comme la modification partielle de la pergola, l’ajout d’éléments occultants ou le changement de certains matériaux, sans nécessiter une démolition complète.
En cas d’échec de la médiation, une mise en demeure formelle adressée au propriétaire de la pergola constitue généralement un préalable nécessaire à l’action en justice. Cette mise en demeure doit préciser les griefs exacts et laisser un délai raisonnable pour régulariser la situation.
Déroulement de la procédure contentieuse
La procédure contentieuse suit des étapes distinctes selon l’ordre juridictionnel concerné.
Devant le juge administratif, la procédure est essentiellement écrite. Après le dépôt de la requête, un échange de mémoires s’organise entre les parties. Le tribunal peut ordonner une expertise ou une visite des lieux avant de rendre sa décision. Les délais moyens de jugement sont de 18 à 24 mois, mais une procédure de référé-suspension peut être engagée parallèlement pour obtenir la suspension de l’exécution de l’autorisation contestée.
Devant le juge judiciaire, la procédure débute par une assignation délivrée par huissier. Le tribunal judiciaire statue après une phase d’instruction qui peut comporter une expertise judiciaire. Cette expertise revêt une importance particulière dans les litiges relatifs aux pergolas, car elle permet d’établir précisément :
- Les caractéristiques techniques de l’installation
- Sa conformité aux règles d’urbanisme
- L’étendue des nuisances éventuelles
En matière de trouble anormal de voisinage, l’expertise judiciaire constitue souvent l’élément déterminant du litige. La Cour de cassation a rappelé dans un arrêt du 19 novembre 2020 que l’appréciation du caractère anormal du trouble relève du pouvoir souverain des juges du fond, qui s’appuient largement sur les conclusions de l’expert.
Voies de recours et exécution des décisions
Les décisions rendues en première instance sont susceptibles d’appel dans un délai d’un mois devant la cour administrative d’appel (ordre administratif) ou dans un délai d’un mois devant la cour d’appel (ordre judiciaire).
L’exécution d’une décision ordonnant la démolition peut s’avérer complexe. En cas de résistance du propriétaire, le bénéficiaire du jugement peut recourir à l’exécution forcée sous astreinte. L’article L.480-7 du Code de l’urbanisme prévoit que le tribunal peut ordonner la démolition sous astreinte, avec un délai d’exécution qui ne peut être inférieur à un mois ni supérieur à un an.
Dans un arrêt du 10 septembre 2019, la Cour de cassation a confirmé que le juge pouvait autoriser le demandeur à faire procéder lui-même à la démolition aux frais du propriétaire récalcitrant, après expiration du délai fixé par le jugement.
Solutions préventives et aménagements alternatifs
La meilleure façon de prévenir un recours en démolition reste l’anticipation des problèmes potentiels avant même l’installation de la pergola. Cette approche préventive combine respect scrupuleux des règles juridiques et recherche de consensus avec le voisinage.
Démarches préalables à l’installation
Avant d’entreprendre l’installation d’une pergola, plusieurs démarches préventives s’imposent pour sécuriser juridiquement le projet.
La consultation des règles d’urbanisme locales constitue la première étape indispensable. Le Plan Local d’Urbanisme (PLU) de la commune fixe des règles précises concernant :
- Les distances minimales par rapport aux limites séparatives
- La hauteur maximale autorisée
- Les matériaux et couleurs recommandés
- Les contraintes architecturales spécifiques
Ces informations sont disponibles en mairie ou sur le site internet de la commune. Certaines zones peuvent faire l’objet de restrictions particulières, notamment en secteur protégé ou en lotissement doté d’un cahier des charges spécifique.
La vérification du régime d’autorisation applicable constitue la deuxième étape cruciale. Selon les caractéristiques de la pergola envisagée (dimensions, matériaux, ancrage), différentes formalités peuvent s’appliquer :
Pour une pergola créant une emprise au sol inférieure à 5m², aucune formalité n’est généralement requise, sauf dispositions contraires du PLU ou situation en secteur protégé.
Pour une pergola de 5 à 20m², une déclaration préalable doit être déposée en mairie. Le formulaire Cerfa n°13703*07 doit être complété et accompagné d’un dossier comportant notamment un plan de situation, un plan de masse et des vues en coupe.
Pour une pergola dépassant 20m² ou située dans certaines zones spécifiques, un permis de construire devient nécessaire (formulaire Cerfa n°13406*07).
La consultation d’un professionnel du droit (avocat spécialisé) ou de l’architecture (architecte) peut s’avérer judicieuse pour les projets complexes ou situés dans des zones à forte contrainte urbanistique. Un certificat d’urbanisme opérationnel peut également être sollicité pour obtenir une confirmation officielle des règles applicables au projet spécifique.
Communication et concertation avec le voisinage
Au-delà des aspects purement juridiques, la prévention des litiges passe par une démarche de communication et de concertation avec les voisins directement concernés par l’installation.
L’information préalable des voisins sur le projet constitue une pratique recommandée, même en l’absence d’obligation légale. Cette démarche permet d’identifier d’éventuelles objections et d’y répondre avant que le projet ne soit finalisé.
La présentation de plans, croquis ou photomontages aide à visualiser l’impact réel de l’installation et peut dissiper des craintes infondées. Dans un arrêt du 14 mai 2020, la Cour d’appel de Rennes a souligné que la concertation préalable constituait un élément d’appréciation favorable dans l’évaluation du caractère anormal ou non d’un trouble de voisinage.
La recherche active de compromis peut prendre diverses formes :
- Ajustement de l’implantation pour limiter les vis-à-vis
- Choix concerté des matériaux et couleurs
- Installation de plantations pour atténuer l’impact visuel
Ces démarches amiables, consignées par écrit, constituent un élément de preuve précieux en cas de litige ultérieur. Un simple échange de courriels confirmant l’accord du voisin sur le projet peut parfois suffire à prévenir une action judiciaire.
Alternatives et solutions d’adaptation
Face à des contraintes réglementaires strictes ou à une opposition marquée du voisinage, des alternatives à la pergola traditionnelle peuvent être envisagées.
Les pergolas autoportantes non fixées au sol échappent généralement à la qualification de construction et au régime d’autorisation associé. Ces structures, reposant sur des plots non scellés, présentent l’avantage de la réversibilité et peuvent être déplacées au besoin.
Les voiles d’ombrage constituent une alternative légère, particulièrement adaptée aux petits espaces. Ces installations textiles, tendues entre plusieurs points d’ancrage, créent des zones ombragées sans constituer une construction au sens urbanistique.
Les tonnelles démontables saisonnières bénéficient d’un régime juridique favorable. Installées uniquement pendant la belle saison et retirées le reste de l’année, elles sont généralement considérées comme des installations temporaires non soumises à autorisation d’urbanisme.
En cas d’installation d’une pergola traditionnelle, certaines adaptations peuvent réduire significativement les risques de contentieux :
- L’ajout de brises-vues ou de canisses sur les côtés orientés vers les propriétés voisines limite les problèmes de vis-à-vis
- Le choix de matériaux naturels comme le bois favorise l’intégration paysagère
- L’installation de plantes grimpantes (glycine, jasmin, vigne vierge) atténue l’impact visuel de la structure
Ces solutions d’adaptation peuvent être proposées comme mesures de régularisation en cas de litige déjà engagé. Dans un arrêt du 7 avril 2021, la Cour d’appel de Nîmes a validé un protocole transactionnel prévoyant l’installation de panneaux occultants et de végétation en alternative à la démolition initialement demandée.
Évolutions jurisprudentielles et perspectives pratiques
Le contentieux relatif aux pergolas connaît des évolutions significatives qui reflètent à la fois les transformations des modes de vie et l’adaptation progressive du droit à ces nouvelles réalités. L’analyse des tendances récentes permet d’anticiper les développements futurs et d’adapter les stratégies juridiques en conséquence.
Tendances jurisprudentielles récentes
L’examen de la jurisprudence des cinq dernières années révèle plusieurs orientations marquantes dans le traitement des litiges relatifs aux pergolas.
On observe tout d’abord une approche plus pragmatique des tribunaux concernant la qualification juridique des installations. Dans un arrêt du 12 octobre 2021, le Conseil d’État a adopté une position nuancée en considérant qu’une pergola bioclimatique à lames orientables, bien que techniquement sophistiquée, ne constituait pas nécessairement une construction soumise à permis si son emprise au sol restait limitée et son impact visuel modéré.
Cette tendance à l’appréciation in concreto des caractéristiques de chaque installation marque une évolution par rapport à une approche plus formaliste antérieure. Les juges s’attachent désormais davantage aux effets réels de l’installation qu’à sa seule qualification théorique.
On constate parallèlement une prise en compte accrue des considérations environnementales dans l’appréciation des litiges. Les pergolas végétalisées ou intégrant des dispositifs d’énergie renouvelable (panneaux photovoltaïques) bénéficient d’un regard plus favorable des tribunaux.
Dans un arrêt du 3 mars 2022, la Cour administrative d’appel de Lyon a validé l’installation d’une pergola photovoltaïque en zone protégée, en soulignant sa contribution aux objectifs nationaux de transition énergétique. Cette décision illustre l’émergence d’une jurisprudence prenant en compte les impératifs de développement durable.
Concernant les troubles de voisinage, on observe une exigence accrue de preuves tangibles du préjudice allégué. Les simples allégations d’atteinte esthétique ou de dépréciation immobilière sont de moins en moins retenues sans démonstration objective, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 17 juin 2021.
Impact des évolutions législatives récentes
Plusieurs modifications législatives récentes influencent directement le contentieux des pergolas et méritent une attention particulière.
La loi ELAN du 23 novembre 2018 a introduit des dispositions limitant les recours abusifs en matière d’urbanisme. L’article L.600-7 du Code de l’urbanisme permet désormais au défendeur de demander des dommages-intérêts lorsque le recours présente un caractère manifestement abusif. Cette disposition a un effet dissuasif sur les recours motivés par la seule volonté de nuire.
La loi Climat et Résilience du 22 août 2021 encourage l’adaptation des bâtiments aux effets du changement climatique. Les pergolas bioclimatiques, qui permettent une régulation naturelle de la température, s’inscrivent parfaitement dans cette logique et peuvent bénéficier d’une appréciation plus favorable, notamment lors de l’instruction des demandes d’autorisation.
La réforme du droit de la propriété des personnes publiques a également des incidences sur l’installation de pergolas en copropriété ou dans les ensembles immobiliers complexes. Les nouvelles dispositions clarifient la répartition des responsabilités et les procédures d’autorisation, réduisant ainsi les sources potentielles de contentieux.
Recommandations pratiques actualisées
À la lumière des évolutions jurisprudentielles et législatives récentes, plusieurs recommandations pratiques peuvent être formulées pour sécuriser l’installation d’une pergola et minimiser les risques de contentieux.
Documentation exhaustive du projet : Au-delà des exigences réglementaires minimales, il est recommandé de constituer un dossier technique complet comprenant :
- Des photographies avant/après en simulation
- Une étude d’impact sur l’environnement immédiat
- Les caractéristiques précises des matériaux utilisés
Cette documentation servira tant pour les démarches administratives que comme élément de preuve en cas de litige ultérieur.
Formalisation des accords amiables : Tout accord obtenu avec les voisins gagne à être formalisé par écrit, idéalement sous forme de protocole d’accord comportant des plans annexés. Ce document, sans nécessairement revêtir une forme notariée, constitue une preuve précieuse de la bonne foi du propriétaire.
Veille réglementaire locale : Les règles d’urbanisme évoluent rapidement, particulièrement au niveau local. Une consultation régulière des modifications du PLU ou du règlement de lotissement permet d’anticiper d’éventuelles mises en conformité nécessaires.
Assurance protection juridique : La souscription d’une assurance protection juridique incluant spécifiquement les litiges d’urbanisme représente une précaution judicieuse. Ces contrats, relativement abordables, couvrent les frais de procédure et d’expertise en cas de contentieux.
Ces recommandations actualisées tiennent compte des orientations récentes de la jurisprudence et des évolutions législatives, offrant ainsi un cadre sécurisé pour l’installation et la défense des pergolas face aux potentiels recours en démolition.
